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Histoire de la mémoire traumatique

créé par La Rédaction du site - Dernière modification le 03/08/2023


L’enfant a une capacité innée à expérimenter l’importance du changement, ou les urgences et les allusions de l’expérience, et de les résumer d’une façon qui transcende l’autorité, dans des modes visuels et tactiles. Par conséquent, l’enfant peut distinguer ces expériences les unes des autres, à un âge très précoce, incluant ces modes d’expériences dans l’émergence du self du petit enfant. Tandis que les bébés grandissent et se développent, ils construisent ces expériences au sein d’une organisation qui devient ce que STERN appelle " le domaine fondamental de la subjectivité humaine " (STERN, 1985).

STERN décrit ce qu’il appelle le noyau du self qui est fait d’un ensemble spécifique d’expériences

1°) L’agencement du self

2°) La cohérence du self

3°) L’affectivité du self (la conscience du modèle des qualités internes, du ressenti, de la perception, des états affectifs des personnes significatives pour lui)

4°) L’histoire du self (sens de la continuité au cours du temps ; le sentiment d’un enfant envers ceux avec qui il continue à être) (STERN, 1985)

Il suggère que des évènements inter-personnels récurrents comme l’acte de nourrir laisse une trace mnésique et que ce modèle invite affectivement de la succession d’évènements similaires serait appelé une représentation d’interactions qui ont été généralisées.

C’est presque exactement ce que Harry STACK SULLIVAN a utilisé pour son appellation " PERATAXIC EXPERIENCE ".

Les données scientifiques de STERN, selon ce que j’en ai compris, excluent certaines conclusions de HEINZ HARTMAN et MARGARET MALHER, en particulier leur notion de moi archaïque, ou de symbiose primaire. Quoi qu’il en soit, au fur et à mesure que l’enfant grandit et développe un sens de la fusion avec quelqu’un d’autre ou une empathie avec une autre personne, cela devient possible sous la forme de relations intersubjectives continues ; parce que l’individu est maintenant capable de savoir qu’il a un esprit et que les autres personnes ont également des esprits.

Puis les expériences subjectives peuvent être partagées jusqu’à un certain point à travers les gestes et les vocalisations. Durant la deuxième année de vie l’enfant développe le langage et est désormais capable d’expérimenter le fait d’être ensemble comme la séparation-individuation du soi et de la mère. Elle est capable de donner les mots que le petit enfant peut lier à des expériences, et alors les mots peuvent devenir un phénomène transitionnel, en empruntant le langage de WINNICOTT. W.R.D. FAIRBAIRN et HARRY STACK SULLIVAN postulent tous les deux pour la similitude d’une certaine séquence du développement de l’enfant émergeant comme un soi séparé dans le processus d’interaction avec la mère, au début de sa vie, (bien qu’il y ait de nombreuses différences entre leur langage et leur énergie).

Un évènement traumatique isolé de courte durée peut ne pas avoir une grande signification dans le long parcours de la vie du petit enfant, en fonction de ses conséquences. Mais les expériences répétées d’abus traumatiques ou d’abus soutenus, ou de négligence soutenue, d’abandon et de séparations peuvent produire un parcours de développement gravement perturbé. De nombreux auteurs ont abordé ce sujet en proposant un modèle écologique d’abus dans la petite enfance qui tente de prendre en compte les histoires du développement des parents, les valeurs culturelles et les stress qui existent dans l’environnement familial, et le lieu de vie des familles.

Donc les actes d’abus sont perçus comme le résultat final des interactions familiales qui interagissent également avec des stress sociaux et situationnels et par là ont un impact sur les points de fragilité du développement de l’enfant.

En fonction du degré et de la durée du traumatisme on peut imaginer quelle étendue de l’interférence ou de l’interruption cela peut entraîner dans le processus du développement conduisant à de graves retards du développement ou à un parcours de développement irrégulier.

Les traumatismes peuvent amener à des stress, même si le mot stress est parfois mal employé, comme s’il était interchangeable avec traumatisme ou même avec anxiété.

Il est utile de réviser les effets du stress sur le développement, dans le contexte BERLIN, 1990 : " à travers toute vie antérieure à l’âge adulte, le plus puissant stress, que l’on peut rencontrer, est la perte totale ou la séparation prolongée du parent nourrissier ".

Le divorce a des conséquences particulièrement sévères sur les enfants d’âge pré-scolaire ou scolaire. Cela peut-être perturbant au niveau du développement de la petite enfance ou de l’adolescence comme l’a souligné récemment WALLERSTEIN, cela peut être gravement perturbant, même, vers la fin de l’adolescence.

La dépression sévère de la mère comporte son aspect le plus nuisible sur le nourrisson et le jeune enfant à tout âge, comportant une détresse empathique, une séparation, et parfois une négligence.

L’abus, aussi bien violent que sexuel, agit également comme une source majeure de stress.

Dans la petite enfance, une maladie aigüe qui conduit à l’hospitalisation et à la séparation est un stress majeur. Cette circonstance a des conséquences graves dans l’adolescence tout aussi bien. Tout au long de la vie le cycle de la maladie chronique et/ou de l’invalidité mentale peut engendrer le stress. Des problèmes structuraux du développement héréditaire ou congénital, de nature orthopédique, comme un pied-bot ; la spina bifida qui nécessite une chirurgie douloureuse de manière itérative ; d’autres défauts congénitaux tels que des anomalies cardiaques, nécessitent également des procédés chirurgicaux inconfortables. De telles conditions peuvent être menaçantes pour la vie, et très douloureuses. De tels stress peuvent n’avoir aucune conséquence traumatique si le support thérapeutique est adéquat.

Des maladies aigües graves des parents, y compris des maladies mentales, provoquent des séparations et interfèrent avec la capacité des parents d’être préparés aux besoins du développement et aux demandes relationnelles de l’enfant, petit ou adolescent. Dans la nature des choses, une maladie mentale d’un parent peut être un facteur de stress puissant et traumatique. Même les changements de lieux géographiques en tant que déplacement de la famille, qui séparent le jeune adolescent d’un groupe de ses semblables, peut proposer au développement du jeune un grave défi.

Avant l’acquisition de l’aptitude au langage les nourissons peuvent montrer leurs réactions au traumatisme, comme le stress, ou comme des expressions telles les coliques,le fait de ne pas cesser de bouger, des problèmes de sommeil et des pleurs ou des vagissements constants. Dans les cas sévères, il y a des interférences avec la prise de poids, la croissance du corps, et la maturation sensori-motrice. S’ils ne sont pas corrigés ces problèmes de la petite enfance peuvent conduire à des interférences avec les fonctions du développement telles la marche, la parole, et l’habileté dans la coordination entre l’oeil et la main.

La dépression persistante, les troubles de la personnalité borderline et la personnalité multiple sont quelques conséquences à long terme des stress traumatiques répétés et soutenus dans la petite enfance.

Un des objectifs principaux de notre étude des traumatismes est la question de ceux qui sont plus vulnérables à la dissociation que les autres.

Qu’est-ce qui rend des personnes capables de survivre dans un camp de concentration, en ayant expérimenté toutes les horreurs d’un camp comme Auschwitz, et en étant encore capable de vivre pratiquement sans symptôme, tandis que bien d’autres personnes qui ont souffert d’un semblable traumatisme et de la torture ont développé une maladie chronique d’un genre ou d’un autre ?

Récemment des études ont mis en évidence le concept d’élasticité : la capacité pour un individu de souffrir d’expériences traumatisantes sans les conséquences de maladies graves. Raymond SOBEL, psychiatre à Dartmouth, qui est maintenant à la retraite, étudiait un groupe de jeunes enfants qui avaient survécu au fait d’avoir grandi dans une famille traumatisante et psychotique et avaient trouvé leur réponse dans leurs capacités à se détacher de la personne psychotique et dans leur propension à nouer des relations qui soient satisfaisantes et gratifiantes. Ils se sont émotionnellement détachés de leurs familles traumatiques et ils sont partis de la maison vers les voisins et les autres personnes qui devenaient des éléments critiques dans leur élasticité de leurs expériences traumatiques.