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Histoire de la mémoire traumatique

créé par La Rédaction du site - Dernière modification le 03/08/2023


De toute manière, JANET s’est donné beaucoup de mal pour pointer que bien des désordres émotionnels ne sont pas rattachés à la mémoire traumatique et qu’il fallait se garder de ne pas " découvrir " les souvenirs traumatiques qui n’existent pas réellement.

L’élaboration et l’étude de l’histoire des patients doivent être menées très prudemment de façon à ce que l’on ne puisse pas introduire dans l’esprit du patient des souvenirs qui n’y étaient pas.

Il continue à décrire ses difficultés en retrouvant ce genre de remémorations, avec une sorte d’état particulier dans lequel il pourrait trouver quelquefois ces patients, un état somnambulique.

Cela s’est vu dans l’écriture automatique, dans les rêves et dans l’évocation des expériences durant le sommeil lorsque la personne était réveillée brutalement. Cela se retrouve également dans les états de relaxation quand on demande simplement à quelqu’un de dire ce qui lui passe par la tête (" somnambulique " sous-entend " hypnotique ").

Pour expliquer le pouvoir de ces remémorations d’engendrer des symptômes, JANET alla plus loin que le mécanisme de la suggestion dans la notion de perte de pouvoir (sentiment que personne ne peut vous aider) que l’on fait au cours des expériences individuelles.

Lorsqu’une personne expérimente cette sorte de désarroi sans l’avoir voulu, cette personne devient beaucoup plus vulnérable à la formation du symptôme, JANET montra une grande familiarité avec la littérature américaine et fait référence en particulier au travail de MORTON-PRINCE (mai 1891, in " Le Journal des Maladies Mentales et Nerveuses ") au niveau des associations de type névrotique, à travers lesquelles il a montré (que) " les névroses consistent bien souvent en l’évocation malheureuse de symptômes psychologiques associés ".

MORTON-PRINCE, qui était associé avec Boris GIDIS, a été influencé par le travail de PAVLOV, sur le conditionnement. Il a écrit sur l’importance de la peur et de l’anxiété en relation avec les remémorations traumatiques et les symptômes qui en découlent.

Les contributions d’ADLER, de JUNG et de bien d’autres dans la littérature psychanalytique sont trop connues pour être citées ici et pourraient transformer ce travail en un travail d’encyclopédie. Or, nous devons continuer à considérer les effets du traumatisme.

JANET (il y a une centaine d’années) et JACOBSON en 1975, ont également fait référence à l’importance de la dépression dans la vulnérabilité de ces expériences de traumatismes. Cela dépend souvent de la manière dont la conservation de la perte de l’estime de soi est expérimentée. La dépression préexistante, ou l’histoire de la dépression, augmente la vulnérabilité au syndrome du stress post-traumatique.

Les remémorations traumatiques pourraient varier dans leurs conséquences selon la précédente expérience du traumatisme, la précédente expérience de l’estime de soi et le degré jusqu’auquel l’expérience du traumatisme courant va miner l’estime de soi et aggrave le sentiment que personne ne peut nous aider et touche à des expériences passées, non résolues, des précédents traumatismes.

Tant que l’implication des sciences cognitives est d’apprendre et d’apprendre encore, qu’elle est autant influencée par l’anxiété, ces expériences traumatiques peuvent aller jusqu'à un plus grand ou un plus faible degré d’interférence avec l’apprentissage.

Quoi qu’il en soit, les traumatismes physiques, les accidents, les brûlures et les fractures ne sont pas nécessairement un signe de perte d’estime de soi. On sait maintenant parfaitement que des meurtrissures fréquentes, des lacérations, des brûlures et des fractures qui arrivent à tous les enfants durant les premières années de leur vie sont relativement minimes au niveau du retentissement psychologique si elles sont d’origine accidentelle.

Si la blessure est infligée par une personne de qui l’enfant doit attendre une protection, c’est bien plus traumatisant.

Par conséquent, il faut faire une nette distinction claire entre le traumatisme avec abus qui sape l’estime de soi de l’enfant, de la part de la personne censée en prendre soin et dans une confiance mutuelle et le traumatisme sans abus qui peut réellement impliquer l’affirmation de l’estime dans l’acte de prendre soin de l’enfant, de la part des personnes qui en prennent soin qui sont responsables et aimantes.

Arthur GREEN qui a passé de longues années à travailler avec les enfants dont on a abusé et leurs parents a observé (GREEN A.H., 1982) que les expériences accablantes des enfants dont on a abusé résultaient souvent d’une paralysie de leurs fonctions cognitives. Ils font également l’expérience des différents états de panique et d’anxiété.

L’exposition soutenue et pénétrante au rejet parental, l’attaque et la privation ont aussi des effets destructeurs sur le développement des relations qui vont suivre dans lesquelles ils anticipent la violence et le rejet comme étant les éléments majeurs des rencontres humaines. Ces enfants dont on a abusé qui étaient très primaires dans leurs mécanismes de défense, apparaissaient aussi découragés.

Ils se dépréciaient eux-mêmes. Ils devenaient auto-destructeurs. Ils montraient des difficultés croissantes dans les séparations d’avec leurs parents. Ils avaient des difficultés avec les professeurs et leurs camarades à l’école.

Dans les programmes de soins de jour on retrouvait que les tout-petits qui avaient subi un abus ignoraient les ouvertures amicales et les approches soignantes de la part des adultes qui en avaient la charge. Ils y répondaient négativement. Ils montraient également des actions plus agressives envers leurs camarades et les adultes qui en avaient la charge (GEORGE et MAIN, 1979).

DAN STERN (1985) a fait une étude rigoureuse de l’émergence du sens du self dans les deux premières années et demi de vie, avec une attention particulière aux évènements des douze premiers mois. STERN et ses collègues utilisèrent le fractionnement des images de la caméra vidéo de manière à obtenir des observations très pointues et très précises des changements survenus d’une minute à l’autre dans l’interaction entre l’enfant et la mère et dans la manière dont l’enfant utilise cette expérience d’interaction pour organiser son propre fonctionnement.

Dans le rapport de sa recherche, STERN nous présente un groupe de notions originales et théoriques qui ne nous était pas familier, notions des " affects vitaux ".

Ces affects vitaux se rapportent à des études de changement et d’expériences émotionnelles telles que se lever, tomber, diminuer, augmenter, s’enfuir, chercher, intensifier, se calmer, éclater, etc... Le terme peut être appliqué à n’importe quel changement dans les états de motivations ou à tout changement dans les intentions. Ce sont les formes des sentiments qui contrastent avec des termes descriptifs tels que le bonheur, la tristesse, la peur, la colère, le dégoût, la surprise, etc...