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Images intérieures, Imagothérapie, rêves et cauchemars

créé par La Rédaction du site - Dernière modification le 06/06/2023


22 mars 2022

Retour vers le futur, laisser vivre l’enfant en nous

Il arrive fréquemment que nous rêvions d’enfant. Tout au long du processus de guérison, les personnes qui souffrent des séquelles d’un traumatisme rêvent d’enfants à différents âges de la vie. Cela suggère qu’il faille souvent revenir à ces moments de l’enfance encore indemnes de tout choc, de toute aliénation ou de maltraitance. Car ce sont des périodes de l’histoire individuelle qui demeurent proches des formes instinctives et émotionnelles issues de l’évolution. Ce sont celles qui signent la véritable nature de l’être et vers lesquelles l’adulte en souffrance peut revenir pour retrouver les traces primaires de son identité propre.

Une explication éthologique

Nos aptitudes, nos représentations du monde, notre philosophie, nos comportements, trouvent leur source et leur origine sous l’influence de deux facteurs essentiels : Le premier de ces facteurs réside en la récapitulation dans le génome humain de l’évolution des espèces. Cela signifie que nous avons hérité des formes instinctives de vie des espèces inférieures depuis les premières formes monocellulaires jusqu’aux mammifères supérieurs dont Sapiens Sapiens fait partie. Instincts qui permettaient l’adaptation à des formes de vie variées, à se défendre, à attaquer et à étendre le territoire. Nous avons gardé présentes ces strates de l’évolution, toujours actives à des niveaux profonds de notre organisme.
L’évolution des temps primitifs vers des formes de vie plus civilisées a peu à peu estompé les manifestations primaires de ces instincts.
Progressivement, l’histoire, le milieu, la culture et l’éducation, forgent les adaptations instinctives de nos comportements que nous connaissons à l’heure actuelle. Peu à peu, l’être humain transforme ses représentations du monde, son mode d’évolution en polissant le caractère primaire des instincts qui gisent au plus profond de l’organisme.
On admet généralement, à quelques inflexions près, que l’ontogenèse récapitule la phylogenèse, c’est un des préceptes de l’embryogénèse. (Principe énoncé par Ernst Haeckel) La genèse de l’individu, de la naissance à l’âge adulte récapitule la genèse de l’espèce.
Aujourd'hui l’énoncé de E. Haeckel a été légèrement modifié. On considère que le développement embryologique de l’organisme s'opère par différenciations successives en écho à l’environnement.
Ainsi les traits les plus généraux apparaissent en premier lors de l'embryogenèse puis sont remplacés par des traits plus spécifiques correspondants à des groupes et à des environnements singuliers.
L'embryon ne prend pas les formes adultes de ses ancêtres mais possède des caractéristiques de la lignée à laquelle il appartient.

Cette imprégnation transformatrice d’influences différentes trouve un exemple frappant dans la façon dont les groupes ethniques construisent leur habitat.
Les peuples Nordiques ont une relation à l’architecture très différente de celle des peuples du sud. Depuis l’amélioration des techniques de construction – matériaux isolants, verre renforcé, etc. –, les gens du sud ont tendance à construire des bâtiments dont les ouvertures sont étroites, les sources de lumière moins souvent orientées au Sud. Les peuples du Nord de l’Europe, quant à eux, construisent des bâtiments aux larges ouvertures qui captent la lumière et la chaleur du soleil. Ce n’est qu’un exemple mais les anthropologues pourraient nous en présenter bien d’autres.
Cependant, d’un point de vue psychologique, cela a des incidences sur les représentations du monde, sur l’imaginaire et sur la façon dont ces peuples envisagent les images du clair et du sombre, de la lumière et de l’ombre, de l’effet de la chaleur solaire sur la peau. Nous y reviendrons au cours de l’exploration des images intérieures.

Il est aujourd'hui clair que même si la structure de l’organisme est très complexe dans les détails, le développement de la vie au sein de l’organisme oriente et infléchit l’impact de l'évolution. On comprend donc qu’un organisme a besoin des conditions optimales pour se développer selon les lignes induites par l’immersion de ses ancêtres dans un environnement spécifique. La société et l’éducation sont les intermédiaires chargés de cette transmission d’une génération à une autre. Que ces conditions viennent à manquer et l’organisme subit un stress dans l’expression de son potentiel développement. Une poche traumatique se crée dont l’influence se fera sentir des années durant.

Ce détour vers la phylogénétique recoupe les hypothèses d’Antonio Damasio. Selon lui, l’être humain réagit au monde selon une graduation qui va du plus primaire au plus différencié. Il reprend à son compte la Théorie Synthétique de l’évolution qui fait la synthèse entre les disciplines concernées par l'évolution, et met l'accent sur les causes externes, adaptatives, de variation et d'évolution des formes : la sélection naturelle, omnipotente ou presque, pilote le changement.

La gradation des réactions au monde repose d’abord sur les organes des sens, lesquels induisent une réponse d’adaptation que la conscience ne contrôle pas forcément. S’ensuit l’émergence de vagues ressentis, embryons d’émotions.
Ces formes vagues et évanescentes sont perceptibles sous forme d’ambiances intérieures dont la conscience ignore la source, ce qui serait anxiogène. Elles sont l’émanation de remugles profonds induits par les capteurs sensoriels confrontés à des objets particuliers – une couleur, une odeur, la disposition particulière d’un lieu, etc.
La qualité et la valeur singulières de ces objets a été mémorisée par l’organisme, ce que l’on nomme souvent « mémoire du corps » qui est bien plus complexe et ne se résume pas à la partie organique matérielle de l’organisme.

L’adulte qui a perdu le contact avec ces sources primaires de la vie se voit dans l’impossibilité de leur donner une forme pertinente quand elles émergent et se frayent une voie vers la réalité – irritabilité, coup de sang rageur, alternances d’humeur, violences physiques, etc. Ce sont des formes d’action de l’organisme que la conscience ne contrôle pas. Cela peut aller jusqu’à des épisodes de dissociations. L’unité de l’être se perd, la conscience de soi se fractionne. La plupart du temps nous cherchons à étouffer ces émergences qui perturbent le bon ordre de notre monde. Ce n’est pas leur existence qui pose problème car elles sont l’expression de la vie en nous, c’est la forme qu’elles prennent car leur épanouissement a été endigué, leur adaptation au monde dévoyée. Leur potentiel créateur agit alors comme une poche magmatique qui couve sous le lourd manteau d’adaptations non pertinentes.

Peut-on revenir sur les dévoiements anciens des forces vitales ?

On peut, par la méditation et par les images intérieures revenir visiter ces moments particuliers quand l’élan de vie demeurait proche du vivant. Ces forces gisent dans les premiers temps de la vie.
Nous pouvons explorer ces territoires de différentes façons. On l’a dit, les rêves nous les signalent et il n’est pas rare que ces derniers explorent longuement une période précise. Celle-là même vers laquelle il convient de se rediriger pour en libérer les énergies captives.
On peut également recourir aux images sous un état de conscience modifié. Soit par l’Imago/mindfulness, soit par tout autre technique – Hypnothérapie, EMDR, etc. – qui facilite la porosité entre le conscience et les couches profondes de l’esprit. Dans ce cas il est important d’observer la plus grande prudence car nous ne pouvons pas aller à l’aventure pour une exploration qui peut se révéler caduque voire dangereuse. L’organisme se protège !
On peut déjà s’appuyer sur le contenu des rêves. C’est la piste la plus fiable car elle nous est donnée par l’organisme lui-même sans interférence aucune avec un objet inducteur.
Sans les indications précieuses données par les rêves, plusieurs voies peuvent nous ouvrir des pistes. Quels que soient les traumas subis – mais pas seulement, les seules influences de l’éducation constituent un facteur d’altération de l’élan vital originel – l’organisme de l’enfant se porte toujours vers l’exploration de la vie, mais il lui faut pour cela, disposer d’un lieu où ses forces vitales peuvent se développer sans risque d’être altérées. Ce besoin de se retrouver seul avec soi est instinctif et ce dernier demeure vivace à l’âge adulte, on n’en tient, hélas, pas assez compte. Ce sont des lieux où l’enfant se recueille dans un coin isolé, jeux, chambre, nature…, ou dans une rêverie solitaire dont la construction est porteuse de sens.
En général, la tranche d’âge la plus favorable pour ces échappées se situe entre 2 ans ½ et 5/6 ans. Au-delà, l’éducation produit ses effets transformateurs de la personnalité. L’enfant s’adapte au monde environnant, il en épouse les règles, les modes et les mœurs.
Le contact direct avec les forces instinctives primaires se modifie, le langage et l’acquisition de la pensée conceptuelle altère la perception consciente des formes primaires de l’émotion. Il apprend à qualifier ses émotions sur le mode de la culture environnante, familiale, sociale… La conscience s’éloigne peu à peu des valeurs premières de l’émotion. Le travail d’amplification des émotions, la réactivation sensorielle facilitent la redécouverte de ces valeurs premières. Nb. : Le terme Valeurs de l’émotion est spécifique des développements proposés par A. Damasio. Je les reprends dans l’état.

Protocole de retour vers l’enfance

Sur la base d’une séance Imago avec Leo, le 2022/03/28

Nous partons dans les territoires de l’enfance, à la rencontre d’un souvenir simple, le premier qui s’impose à l’esprit. Ce souvenir choisit d’émerger. Damasio insiste pour nous parler de l’intelligence de l’organisme. Revisiter l’enfance, c’est aller à la rencontre de ces univers par des protocoles simples et répétitifs. Par la répétition on crée de nouveaux conditionnement qui facilitent la porosité de la conscience pour des contenus profonds et archaïques.

Notons la particularité du dispositif :

  • Le sujet est détendu, sa conscience commence à explorer ce souvenir. La position de cet œil conscient est identique à celui du photographe. Il explore, il scrute, réceptif à tous les objets qui se présentent à lui : lumière, sons, odeurs, … la disposition des lieux, le moment dans la journée, dans l’année, les personnages... L’œil explore, curieux et ouvert. Cette attitude de non-jugement est favorisé par un état de conscience modifiée.
  • Puis, l’œil évalue l’ambiance particulière des lieux qu’il vient d’explorer. Une forme immatérielle, un climat, ce fameux ressenti qui est l’embryon de l’émotion.
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  • Enfin, l’œil se retire du territoire de l’enfance et se retourne en lui. Il explore désormais ce que cette visite a produit en soi.
  • Quel émoi s’est éveillé à l’exploration de ce souvenir ?
  • On constate, sans jugement.
  • En dernier lieu, la conscience vigile, toujours présente malgré cet état modifié, garde en mémoire toutes les étapes de cette exploration.
  • La suite, c’est l’organisme qui s’en chargera.