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De la fonction transcendante à l'Imagination active

créé par La Rédaction du site - Dernière modification le 03/08/2023


L’imagination active est une méthode de la psychologie analytique, théorie créée par le psychiatre suisse Carl Gustav Jung. La méthode consiste à donner une forme sensible aux images de l’inconscient et d’élargir ainsi la conscience.

 

L’imagination active est une méthode de la psychologie analytique, théorie créée par le psychiatre suisse Carl Gustav Jung. La méthode consiste à donner une forme sensible aux images de l’inconscient et d’élargir ainsi la conscience.

 


De l’Imagination agente des Ismaéliens à l’Imagination active de C. G. Jung, il y a un pont que Henri Corbin l’aida à franchir. Même si cet érudit, spécialiste du Chiisme, est fort critiqué, son témoignage sur l’Islam aida probablement Jung à mieux situer sa propre conception de l’Imagination active.1 Dès 1916, Jung produisit un article sur la « Fonction transcendante »2 et son usage thérapeutique, qui constitue quasiment le seul document technique produit par Jung tout au long de ses années de recherche. C’est aussi le premier document dans lequel il sera abondamment question de l’Imagination active. On y trouve ce qui est aux sources de la psychologie des profondeurs et qui fera son originalité : une conception dynamique de la psyché. Dans ce document très court, Jung répond à toutes les questions que l’on se pose encore actuellement à propos de la cure psychanalytique, du rôle du thérapeute et celui de la cure, la situation de l’individu dans le collectif et, ce qui nous intéresse ici : comment aborder « l’union des contenus conscient et inconscients ».


C. G. Jung a trouvé, de façon totalement empirique, sa propre voie vers l’Imagination active. Cela lui prit plusieurs années, car il ne lui suffit pas d’apprendre à voir les images venues de l’inconscient, ni même de les rencontrer activement dans ses phantasmes3 : il ne se sentit à l’aise que lorsqu’il fit le pas décisif, le plus important de tous : trouver leur place et leur raison d’être dans sa propre vie actuelle et concrète. « C’est, dit-il, la démarche la plus importante et ce que, habituellement, nous négligeons de faire. La connaissance du mythe de notre inconscient, poursuit-il, doit être convertie en obligation éthique. Ne pas le faire serait devenir la proie du principe de puissance, ce qui produit des effets destructeurs, non seulement sur les autres, mais aussi sur celui qui en fait l’expérience ». Il poursuit : « Les images venues de l’inconscient placent un homme devant une grande responsabilité. Ne pas les comprendre ou fuir la responsabilité éthique le prive de sa totalité et impose un caractère péniblement fragmentaire à sa vie.4


Se laisser pénétrer par les images intérieures permet à l’Ego d’accéder aux forces vives et souvent brutales de l’inconscient. Ce mouvement de pénétration et d’écoute, fixé dans la mémoire et « l’écriture » facilite l’alliance avec ses forces qui trouvent alors une voie d’écoulement qui posera les bases de nouvelles adaptations au monde. En cela l’image intérieure diffère du rêve, car, sans une expérience poussée, nous n’avons aucun contrôle sur notre façon d’agir dans ce dernier. Si, la plupart du temps, l’analyse et l’amplification des rêves suffit à rétablir l’équilibre entre le conscient et l’inconscient, dans certains cas, sur lesquels nous reviendrons plus tard, il faut en faire davantage. La crispation du conscient est telle que rien ne se produit.


Le but de ce travail étant toujours d’entrer en contact avec l’inconscient, cela signifie qu’il faut, d’une façon ou d’une autre, lui laisser la possibilité de s’exprimer – Quelqu’un qui ne serait pas convaincu que l’inconscient a sa vie propre n’a aucune raison d’essayer cette méthode. On a presque toujours à surmonter une crispation du conscient pour permettre aux phantasmes – qui sont toujours plus ou moins présents dans l’inconscient – de monter à la conscience. Jung disait qu’il pensait que le rêve se poursuivait continuellement dans l’inconscient, mais que le sommeil et la cessation complète de l’attention aux choses extérieures étaient nécessaires pour que le conscient puisse l’enregistrer. C’est pourquoi le premier pas, en Imagination active, est d’apprendre à voir ou à entendre le rêve à l’état de veille. Jung dit aussi dans le Commentaire sur le mystère de la Fleur d’Or : « Chaque fois que l’on désire que le contenu du phantasme émerge, l’activité du conscient doit être mise de côté. Les résultats de ces efforts sont d’abord peu encourageants dans la plupart des cas. Il s’agit surtout d’écheveaux de phantasmes qui ne permettent pas de discerner clairement leur provenance et leur destination. Les moyens d’obtenir des phantasmes sont également différents suivant les individus. Pour beaucoup, le plus simple est de les écrire ; d’autres les visualisent ; d’autres encore les dessinent ou les peignent avec ou sans visualisation. Lorsqu’on a affaire à une crispation accentuée du conscient, il arrive souvent que seules les mains puissent imaginer : elles modèlent ou dessinent des formes qui sont souvent étrangères au conscient.


Ces exercices doivent être poursuivis jusqu’à ce que la crispation de la conscience soit dénouée, en d’autres termes, jusqu’à ce que l’on puisse laisser advenir, ce qui est le but immédiat de l’exercice. Une nouvelle attitude est ainsi créée, une attitude qui accepte également l’irrationnel et l’incompréhensible, simplement parce que c’est ce qui advient. Cette attitude serait un poison pour quelqu’un qui a été submergé par ce qui est purement et simplement advenu ; mais elle est une valeur suprême pour celui qui, par un jugement exclusivement conscient, s’est toujours borné à choisir ce qui convenait à sa conscience dans ce qui advient purement et simplement, et qui est ainsi sorti de la vie pour échouer dans une lagune stagnante ».5