Accompagner les rescapés.es de psychotraumatisme et de violences sexuelles
Victime, histoire d'un mot
Le terme victime est d’un emploi rare avant le XVe siècle. Il vient du latin victima : « créature vivante offerte en sacrifice aux dieux ».[i]
C’est la définition consacrée à la fin du XVe siècle (1495). Les sacrifices humains étaient courants dans les civilisations antiques. Il y a donc à la base même du terme une connotation sacrificielle qui a été très bien mise en évidence, tant sur le plan social et psychologique que pénal par divers auteurs, dont les travaux de René Girard.[ii] Il en dérive bien sûr un sens en théologie chrétienne, le Christ étant la victime suprême, d’un prix absolu. Par extension et plus tard (début du XVIIe, 1617) la définition évolue.[iii] C’est à dire que le terme victime est suivi de la préposition de, on est victime de (de haine, de tourments, d’injustice, d’agression).
On sort donc du constat (et d’une position de verticalité, de rapport entre l’homme et les puissances supérieures, pour entrer dans l’explication (et dans une position d’horizontalité – de conflit entre personnes.[iv] On glisse également (est-ce par abus de langage ? par sens commun ?) d’une expression réservée aux personnes ayant subi un grave dommage corporel, voire mortel, à l’ensemble des personnes subissant un préjudice (que ce soit une atteintes aux droits, aux intérêts, au bien-être). Il y a également une conception populaire de la victime qui veut que le criminel et la victime diffèrent radicalement comme « noir et blanc ».[v] Au-delà de ces quelques précisions terminologiques, le concept-même de victime ne se laisse pas aisément définir tant sont liées dans ce concept des approches sociologiques, juridiques et bio-psychologiques (ce n’est d’ailleurs pas un hasard si ce sont les trois approches thématiques de cette journée). A l’appui de ces difficultés, quelques exemples :
[i] – Dictionnaire Petit Robert, 2002, version électronique.
[ii] – Girard R. (1979), Des choses cachées depuis la fondation du monde, Paris, Grasset ; Girard R. (1982), Le bouc émissaire, Paris, Grasset ; Girard R. (1976), La violence et le sacré, Paris, Gallimard ; Robert C.-N. (1986), L'impératif sacrificiel - Justice pénale : au-delà de l'innocence et de la culpabilité, Lausanne, Editions d’en-bas.
[iii] – Dictionnaire Petit Robert, 2002, version électronique.
[iv] – Boggio Y., Matthey J. (1997), « Victime, société, état », in Aides aux victimes, regards pluridisciplinaires, Cahiers médico-sociaux, Genève, Médecine et Hygiène.
[v] – Ellenberger H. (1954), "Relations psychologiques entre le criminel et la victime", Revue internationale de criminologie et de police technique, Vol VIII, no 2, pp. 103-121.